Quand Willie Nelson vante les charmes d’une contrée sans nuages dans son succès Uncloudy Day, on comprend pourquoi il est chanteur plutôt que programmeur : il n’a tout simplement pas saisi les avantages des nuages!

D’autres les ont bien compris, par contre, et font grand cas des avantages de l’informatique dans les nuages (cloud computing).

L’informatique dans les nuages, ou dématérialisation, est encore souvent décrite dans la presse spécialisée comme un concept nouveau, même si ses premiers balbutiements remontent à au moins aussi loin que l’application de messagerie bien connue gmail de Google. Le concept a gagné en popularité avec la concrétisation de sa notion essentielle : les données et les applications étant hébergées sur le Web, les utilisateurs peuvent se balader librement dans le cyberespace sans avoir à acheter d’ordinateur. Un accès au Web – à la bibliothèque municipale ou à un café Internet, par exemple – suffit pour faire de nous un internaute.

C’est la raison pour laquelle Google fait la promotion de ses Google Apps – l’informatique dans les nuages poussée à l’extrême – et Amazon, Microsoft et une demi-douzaine d’autres sociétés tentent de prendre le train en marche.

Tout cela est très emballant. Mais pour l’administration, ce concept soulève de nombreux problèmes parce qu’il pourrait impliquer un hébergement des données hors du secteur public, ce qui aurait des répercussions évidentes en matière de protection des renseignements personnels et de sécurité.

La principale préoccupation du secteur public à l’égard de l’informatique dans les nuages a été bien formulée récemment par Carolyn Lawson, dirigeante principale de l’information de la California Public Utilities Commission, à l’occasion d’une discussion entre spécialistes du domaine :

« Du point de vue des administrations publiques, je ne vois pas le jour où nous stockerons tous nos renseignements sur le Web, parce qu’ils comprennent entre autres des numéros de sécurité sociale et de permis de conduire. Nous savons quelles écoles fréquentent vos enfants, et quand le public nous transmet ses renseignements, il s’attend à ce que nous en assurions la confidentialité. Si nous confions de telles données à une société d’informatique dans les nuages, que ferons-nous en cas de faille de sécurité ou de vente de l’entreprise? Je suis responsable. » [traduction]

Exactement. La responsabilité est au cœur de la question.

Plus près de nous, l’informatique dans les nuages a été abordée indirectement l’été dernier par la commissaire fédérale à la protection de la vie privée, Jennifer Stoddart, lorsqu’elle a évoqué avec des journalistes la possibilité que les tribunaux fédéraux et des organismes quasi judiciaires publient les noms des gens en ligne dans des décisions et d’autres documents.

« La règle de la publicité des débats judiciaires, qui est extrêmement importante sur le plan historique, est maintenant faussée par les puissants moteurs d’indexation qui permettent d’effectuer des recherches, partout dans le monde, dans des documents contenant toutes sortes de renseignements personnels, d’affirmer Mme Stoddart. Cette règle a été édictée dans un contexte bien différent. »

Voilà un peu la toile de fond sur laquelle s’inscrivent les mises en garde formulées par le groupe Gartner, poids lourd en matière de recherche, au sujet de l’informatique dans les nuages. Les analystes de Gartner ont cerné à cet égard pas moins de sept aspects à prendre en considération sur le plan de la sécurité :

L’accès privilégié des utilisateurs La conformité réglementaire L’emplacement des données La ségrégation des données La récupération Le soutien aux enquêtes La viabilité à long terme.

Si vous venez à bout de chacun de ces éléments, alors peut-être, peut-être pourrez-vous viser les nuages.

Pour l’essentiel, ces facteurs font de l’informatique dans les nuages une proposition difficilement envisageable dans le secteur public, malgré l’arrivée possible d’une véritable horde de cybercitoyens débutants. Ces utilisateurs zélés ne se soucient peut-être pas des divers rapports qui signalent des pertes de données, mais les responsables des TI dans les administrations publiques s’en préoccupent, eux. Parlez-en seulement aux personnes qui ont dû s’occuper de la perte d’un dispositif à mémoire contenant des renseignements sur tous les prisonniers d’Angleterre et du pays de Galles.

Encore que… les nuages n’ont pas à être obligatoirement publics.

Le secteur public dispose déjà d’une vaste expérience des applications internes Web 2.0, particulièrement les wikis, qui sont de plus en plus répandus. Rien n’empêche de transposer cette approche à l’informatique dans les nuages. De fait, Google a sauté sur l’occasion en présentant le concept de logiciel sous forme de service (software as a service  ou SaaS) comme la clé d’un changement de paradigme en ce qui a trait à la faç