Ne vous fiez à personne de plus de 30 ans, déclarait Jerry Rubin en 1967. Jerry, chef du Parti Jeunesse internationale, les Yippies, demandait aux baby-boomers, qui amorçaient alors leur entrée sur le marché du travail, de rejeter les normes de leurs prédécesseurs et de créer un monde meilleur. Par un remarquable renversement de situation, les baby-boomers occupent maintenant presque tous les sièges au comité de direction de chaque ministère et ils ont conclu qu’ils n’ont pas confiance dans les moins de 30 ans, tandis que ceux-ci veulent créer un monde meilleur.
On parle abondamment du tsunami de la retraite et de la relève. Même si on la perçoit souvent comme une première, il s’agit en fait de la troisième vague majeure de dotation et de renouvellement des effectifs depuis la Deuxième guerre mondiale. En 1946-1947, la Commission de la fonction publique a offert un emploi à quelque 50 000 anciens combattants – soit près de la moitié de la fonction publique de l’époque. Ces personne ont engorgé le système pendant 25 ans, jusqu’aux années 1970, lorsqu’elles sont massivement parties à la retraite, libérant du coup la place pour la nouvelle génération de baby-boomers détenteurs de diplômes universitaires. Cette génération s’est rapidement emparée des postes de cadres, où elle a ensuite engorgé le système pendant 25 ans. Maintenant qu’elle est au bord de la retraite, la génération Internet piaffe d’impatience pour prendre sa place.
De quelle façon pouvons-nous assurer cette transition?
Don Tapscott formule quelques suggestions dans son article et dans son nouveau livre intitulé Grown Up Digital. Dans quelle mesure son diagnostic est-il exact? Et chose plus importante encore, quelles en sont les répercussions pour les dirigeants de la fonction publique? Nous avons demandé leurs commentaires à cinq membres de la génération Internet qui sont dans la fonction publique.
Pierre-Luc Pilon est coordonnateur de projet de GI-TI pour les Collectivités intégrées, à RHDSC, et professeur de Marketing cybernétique à La Cité Collégiale. Au cours de la dernière année, Il a travaillé pour YMAGIN, la collectivité jeunesse de RHDSC. Il est inscrit au programme de maîtrise en environnement à l’Université de Sherbrooke.
À mon avis, la génération Internet est porteuse d’espoir. Nous savons dans quel chaos nous nous trouvons, nous savons que nous avons à tout jamais modifié notre environnement, les guerres font rage, et nous pourrions vivre moins longtemps que nos parents. Mais nous gardons espoir. Non, nous gardons la foi. Nous sommes de véritables agents de solution de problèmes. Nous maîtrisons l’un des outils les plus puissants qu’ait connus l’humanité : l’Internet. C’est un moyen d’améliorer sensiblement notre situation.
Comme l’a déclaré Barack Obama au début de sa campagne : « Il n’y a rien de faux dans l’espoir! »
Pour certains, les membres de la génération Internet sont égocentriques, obnubilés par l’argent et se foutent de tout. Permettez-moi de vous dire que c’est totalement faux. Demandez donc à vos stagiaires, à vos étudiants et à vos nouveaux employés pourquoi ils ont choisi la fonction publique. Ce n’est pas pour la sécurité d’emploi, le régime de soins de santé ou la retraite. Nous sommes à la fonction publique parce que nous voulons faire notre part dans la société et que nous aspirons à faire la différence.
Je viens en aide aux membres de la génération Internet qui font leur entrée dans la fonction publique, je leur sers de guide. Je suis d’accord avec les sept moyens que propose Tapscott pour amener les membres de cette génération à travailler efficacement, mais j’insiste sur trois points :
1. N’utilisez pas les membres de cette génération comme des fantassins. Ils sont trop souvent affectés au classement ou à la photocopie de documents. Ils sont venus à la fonction publique pour faire la différence. Donnez-leur cette possibilité.
2. Faites vous-même preuve d’intégrité. Avec les membres de cette génération, le respect n’est pas un dû, il se gagne. Travaillez avec eux dans le respect et la transparence; ils vous paieront en retour sous forme de loyauté et d’honnêteté.
3. Laissez-les élaborer votre stratégie Web. L’Internet fait partie de leur langage. Ils pensent Web. Ce sont eux les pros; alors, traitez-les comme tels.
Jodi LeBlanc est analyste en soutien des opérations à la section de la TI du ministère des Anciens combattants, à Charlottetown. Elle a été prêtée à l’équipe de projet image de marque de la fonction publique l’hiver dernier. Elle est représentante au projet Canada@150, qui invite les jeunes fonctionnaires à réfléchir sur le Canada et son avenir, à définir les problèmes auxquels le Canada sera confronté à son 150e anniversaire, en 2017, et à proposer des solutions.
Tapscott fournit des conseils vraiment utiles lorsqu’il aborde la façon de faire travailler efficacement les membres de la génération Internet au sein des organismes. « Ne les utilisez-les pas comme des fantassins. Considérez-les comme vos pairs, écoutez leurs suggestions. Responsabilisez-les; ils vous surprendront agréablement. » On ne saurait dire plus vrai. On accorde très peu de responsabilités à un très grand nombre d’employés au départ, et on leur demande rarement leur avis – malgré leur formation, leur expérience et leur envie de participer. Plus on se sent valorisé, plus on travaille.
Contrairement aux blagues qui circulent, la plupart des nouveaux employés ne s’attendent pas qu’on leur remette les clefs du bureau de la direction; ils savent qu’ils doivent gagner leur place. Mais ils commencent à se désengager lorsqu’on ne les fait pas participer et qu’ils ne se sentent pas appréciés.
Les baby-boomers et les membres des générations X et Internet n’ont pas le même âge, leur expérience et leurs compétences sont différentes; pourtant ils partagent la même éthique et les mêmes valeurs au sein de la fonction publique, et ils ont un but commun, faire une différence dans la vie des Canadiennes et des Canadiens. C’est pour cela que avons tous choisi d’entrer dans la fonction publique, n’est-ce pas? Nous voulons tous avoir le sentiment d’être membre d’une équipe et tirer de la fierté de ce que nous accomplissons ensemble. Il est bon d’entendre une vaste gamme d’opinions et d’idées avant de prendre une décision. Alors, faisons participer la génération Internet et soyo