Karen Ellis est vice-présidente de la Direction générale du renouvellement de la fonction publique et de la diversité à l’Agence de la fonction publique du Canada (anciennement l’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada). Elle participe à l’élaboration et à la mise en œuvre du « programme de renouvellement » de l’agence, décrit dans notre numéro de mars par Kevin Lynch. Au cours des 23 dernières années, elle a travaillé dans neuf ministères, dont le MDN. Quelles sont les principales leçons à retenir en matière de leadership pour favoriser le renouvellement de la fonction publique?
L’influence des chefs est profonde. Ils doivent évoluer dans un monde de plus en plus complexe et mener les autres à bon port. Voici cinq leçons que j’ai apprises des chefs avec qui j’ai travaillé, et que j’ai tirées de ma propre expérience.
Leçon no 1 : Veillez à ce que vos subordonnés sachent ce que vous voulez et amenez-les à accomplir la mission (Les principes du leadership, Forces canadiennes).
Les chefs exceptionnels que je m’efforce d’imiter font preuve de détermination, agissent de manière stratégique et savent maintenir le cap. Leur engagement personnel à long terme est inspirant.
Le chef a pour rôle premier de préciser une vision, un objectif et une orientation afin que les gens autour de lui puissent mettre leur travail en perspective et contribuer à atteindre l’objectif fixé. Si vous ne savez pas où vous allez ni pourquoi, vous ne pourrez pas l’expliquer clairement à vos collègues, à votre famille ou à vos amis, ces derniers représentant le test ultime. Vous devez donc connaître l’historique et le contexte, et savoir anticiper la suite des événements. Vous devez expliquer tous ces éléments plusieurs fois, de diverses manières et dans des circonstances différentes, et le plus souvent possible en personne.
Une fois que l’orientation est claire, le chef doit veiller à ce que le message soit diffusé dans toute l’organisation de manière systématique et continue, afin qu’il soit compris de chacun et que tous s’y rallient. À la NASA, un concierge qu’un visiteur avait interrogé au sujet de son travail avait répondu : « J’aide à envoyer les gens dans l’espace. » Il avait compris la stratégie d’ensemble et son propre rôle au sein de celle-ci.
Les chefs n’hésitent pas à fixer des normes et des attentes concernant le rendement et à les faire connaître. Ils s’attendent à ce que les gens fournissent un certain rendement et ils veillent à leur donner les outils dont ils ont besoin pour y arriver. Ensuite, ils prennent le temps de reconnaître de manière concrète l’excellence et les progrès accomplis.
Leçon no 2 : Assumez votre autorité et établissez les règles d’engagement dès le départ. Les gens veulent des chefs habiles, en qui ils peuvent avoir confiance et qui sont dignes de respect. Il est important de vous faire connaître dès votre entrée en fonction.
D’après mon expérience, la plupart des gens aiment que les rôles, les responsabilités et les attentes soient clairs. Ce principe n’exclut pas pour autant la souplesse et la créativité du travail en équipe. Cela signifie simplement que la transparence sert un objectif fondamental, particulièrement lorsque les approches sont moins axées sur la hiérarchie.
Jeune enseignante, j’ai appris à affirmer mon autorité pour avoir le respect immédiat de mes élèves, faute de quoi je perdais le contrôle de ma classe. J’ai été trop amicale avec les élèves de ma première classe, et j’en ai subi les conséquences. Fonctionnaire, j’ai appris à mesurer toute l’importance d’asseoir mon autorité et de fixer les limites propres aux relations de travail. Être respecté est essentiel; si l’on nous aime bien en plus, tant mieux.
Une autre leçon essentielle que j’ai apprise, c’est qu’il y aura toujours un volontaire pour remplir le rôle de chef si ce dernier se trouve vacant.
Les chefs qui sont de nouveaux arrivants dans une culture bien établie sont parfois sous-estimés ou rejetés. À mon avis, il est essentiel de prendre des mesures claires pour dire aux gens qui vous êtes, au propre comme au figuré, et pour faire connaître votre méthode de travail, vos attentes, ce à quoi votre entourage peut s’attendre et ce que vous comptez leur apporter. En faisant tout cela d’une manière qui vous est propre, vous établissez les règles d’engagement ouvertement et sans équivoque. Cette étape cruciale doit être franchie dès que possible.
Certaines des situations les plus difficiles que j’ai connues étaient celles où les responsabilités et les rapports hiérarchiques étaient flous, ce qui donnait lieu à des pressions écrasantes et diminuait la productivité. La grande leçon à tirer de tout cela, c’est qu’il faut éviter de créer de telles situations dès le départ. Il ne faut pas avoir peur de ses responsabilités. À ma connaissance, personne n’aime marcher sur des œufs tous les jours.
Un chef doit dire ouvertement comment il entend faire face aux problèmes de rendement. Il doit faire preuve de fermeté, offrir du soutien et faire preuve de courage, afin de traiter avec équité, compassion et franchise ceux qui ont besoin de savoir que les choses ne fonctionnent pas, même après y avoir mis le meilleur d’eux-mêmes. Parfois, savoir encourager, c’est savoir encourager quelqu’un à adopter une nouvelle voie. Tous ne sont pas traités de la même manière, mais tous sont traités avec équité.
Leçon no 3 : Les personnes humbles ne se dévalorisent pas; elles ne font que passer moins de temps à penser à elles-mêmes (Ken Blanchard, The Heart of a Leader: Insights and the Art of Influence).
Il est primordial pour un chef de trouver un juste équilibre entre l’humilité et la confiance en soi. Plus un poste est élevé dans la hiérarchie, plus cela est important. L’humilité, c’est savoir que vous avez besoin des autres pour atteindre vos objectifs. Pour vous aider à garder les pieds sur terre, gardez contact avec un cercle de collègues et d’amis qui partagent vos fardeaux et vous disent franchement ce qu’ils voient dans votre comportement.
L’humilité aide à continuer d’apprendre, à reconnaître ses erreurs et