Depuis plus de 30 ans, le gouvernement fédéral a reconnu le besoin de négocier avec les autochtones du pays des ententes de revendications globales territoriales, qui constituent en fait des traités modernes entre la Couronne et les nations autochtones. Le premier traité de l’ère moderne à être conclu fut la Convention de la Baie James et du Nord québécois avec les Cris et Inuits du Québec à la fin des années soixante-dix.

Instruit par cette première expérience et en réponse à l’arrêt Calder de la Cour Suprême du Canada (1973), le gouvernement fédéral a développé sa politique qui guide encore aujourd’hui l’élaboration de ses mandats de négociations avec les différentes nations autochtones canadiennes, politique qui a été modifiée au fil de l’évolution de la pensée juridique et de l’expérience acquise avec la mise en œuvre des traités. La responsabilité de mener ces négociations a été assignée au ministre des Affaires indiennes et du nord canadien au nom du gouvernement fédéral. Le ministère a développé avec les années une expertise unique en termes de négociations avec les groupes autochtones et les gouvernements provinciaux et territoriaux et a créé, il y a un peu plus d’un an, un Centre d’excellence en négociation.  Le Centre d’excellence se veut un outil unique de développement du personnel et de la capacité de négociation. Il entend devenir le point de référence pour offrir conseils et avis au sein de la machine fédérale en matière de négociations entre le gouvernement fédéral et les groupes autochtones et même assumer, lorsque requis par un partenaire fédéral, la responsabilité de mener la négociation en son nom. À ce jour, 22 traités modernes ont été conclus avec des nations autochtones dont le plus récent avec la nation des Maa-Nulth de la Colombie britannique.

Le développement économique et politique de la grande majorité du Nord canadien est aujourd’hui encadré par la mise en œuvre de traités modernes. D’ailleurs la création du Nunavut est le résultat d’une telle entente.  Actuellement, plus de 50 tables de négociations sont actives, majoritairement en Colombie britannique, au Québec et dans les Maritimes. En ce qui concerne le Nord canadien, il y a encore quelques tables actives visant à établir une certitude envers les titres et les droits autochtones.  De plus, il est important de noter que depuis 1995, le gouvernement fédéral s’est doté d’une Politique visant à reconnaître le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale et offre de négocier, en parallèle avec les revendications globales, des ententes avec les groupes autochtones qui leur permet d’assumer leur gouvernance interne ainsi que de nombreuses juridictions.

À ces 22 traités modernes, il faut aussi ajouter et porter une attention particulière à l’existence des traités historiques signés avec les premières nations. Il ne faut surtout pas sous-estimer l’importance et la signification de l’existence de ces traités. Du point de vue des premières nations signataires, ces traités consistent en une reconnaissance de leur statut particulier en tant que nations et constituent les paramètres ultimes devant guider les relations entre les nations signataires.

Bien entendu, nous pouvons débattre sans fin sur la signification de ces traités, modernes et historiques, sur la qualité de la mise en œuvre, sur la qualité des relations établies entre les parties et surtout sur l’impact de l’existence de ces traités sur le développement social et économique des nations autochtones signataires. Ce débat intervient à divers niveaux; politique, juridique et bureaucratique. Heureusement, on constate que toutes les parties au débat font preuve d’une volonté grandissante afin de trouver un terrain d’entente, dans un esprit de conciliation des droits et intérêts des peuples autochtones avec la souveraineté canadienne et, plus largement, de respect des différences et de partage de la prospérité.

Par ailleurs, en tant que fonctionnaires fédéraux, il est légitime de se demander à qui incombe la responsabilité de la mise en œuvre de cette relation. N’est-ce pas la responsabilité première du ministère des Affaires indiennes et du nord canadien, étant donné son rôle à titre de négociateur fédéral des traités modernes, d’agent de la mise en œuvre de ceux-ci et d’interlocuteur privilégié des nations autochtones avec la couronne fédérale?

La réponse à cette question est selon moi plus complexe. Malgré l’existence de traités historiques et modernes avec nos partenaires autochtones, nous devons tous avouer que la situation des peuples autochtones au Canada n’est pas enviable!  Au cours des années, les efforts des différents acteurs en place ont certes améliorés la situation, mais un long chemin reste à parcourir; on n’a qu’à penser aux conditions de vie présentes dans trop de réserves, aux problèmes de santé que trop de citoyens de ces communautés vivent, à la prospérité économique qui s’arrête souvent aux portes de ces communautés! Par ailleurs, les signataires des traités modernes bénéficient quant à eux d’une situation plus favorable. En effet, par la conclusion de traités modernes incorporant des ententes d’autonomie gouvernementale, ces nations participent à la gestion des ressources de leur territoire, de concert avec les différents paliers gouvernementales. Elles ont aussi déployé une gouvernance répondant davantage à leurs besoins et leur réalité, un régime d’imputabilité des gouvernements locaux à l’égard de leurs citoyens, bref, une adhésion à la Confédération canadienne. Ils ont à leur disponibilité les outils nécessaires pour interagir avec les divers paliers de gouvernement et de prendre les mesures nécessaires pour assurer le développement économique et social de leurs communautés.  

Les signataires de traités historiques ne sont pas en reste. Il leur est également possible, si on accepte de développer avec eux un partenariat, d’assumer un rôle dans la gestion des ressources et de tirer profit des opportunités socio-économiques. Il nous incombe de leur ouvrir la porte, d’accepter de discuter avec eux, de les reconnaître comme des chefs de file que nous nous devons d’appuyer et de respecter. Il est de notre devoir de développer des approches flexibles aptes à refléter leurs multiples situations, tout en favorisant la saine gestion et l’imputabilité, des principes généralement bien acceptés et véhiculés par le leadership autochtone.

Un agenda clair de réconciliation fortement démontré par les excuses publiques offertes par le premier ministre Harper aux victimes des pensionnats indiens nous offre ces occasions de développer de nouveaux partenariats avec nos concitoyens autochtones. C’est dans ce contexte de réconciliation que l’on doit envisager notre rôle dans la relation avec les groupes autochtones. Il y a une volonté claire à laquelle je vous invite à vous souscrire. Les excuses publiques de la part du premier ministre canadien ont crées un environnement unique et une opportunité que nous nous devons de saisir. La création d’une relation de travail basée sur l’existence des traités modernes et historiques entre les nations autochtones et la Couronne nous offre à mon avis une possibilité rêvée de travailler ensemble à la prospérité du pays.

Le ministère des Affaires indiennes et du nord canadien, par l’entremise de sa direction générale de la mise en œuvre a la responsabilité de mettre en place un cadre de gestion pour guider ses collègues dans la livraison de leurs responsabilités dans le cadre des traités. Nous avons bénéficié d’interventions du bureau de la vérificatrice générale, d